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Imaginaire nordique

Par Marie-Claude Bourdon

30 avril 2007 à 0 h 04

Mis à jour le 17 avril 2015 à 16 h 04

Dans le laboratoire de ce chercheur, il n’y a ni fioles, ni éprouvettes, ni microscope électronique, mais de puissants ordinateurs remplis de mots et d’images. ici, c’est un monde imaginaire qui est scruté à la loupe, décomposé, cartographié et comparé.

«Le Laboratoire international d’étude multidisciplinaire comparée des représentations du Nord a été le premier projet Relève en sciences humaines financé par la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI)», souligne son directeur, Daniel Chartier, professeur au Département d’études littéraires et également directeur de la revue Voix et Images.

L’idée du Nord est-elle la même au Québec, en Finlande ou en Suède? Ce projet technologique qui a pour but de recenser toutes les oeuvres comportant un caractère nordique est aussi un lieu virtuel de rassemblement pour une douzaine de chercheurs répartis dans une dizaine d’universités, principalement au Québec et en Europe.

«L’objectif du laboratoire est d’étudier l’imaginaire du Nord dans une perspective comparée, en partant de la littérature vers les autres arts, que ce soit les arts visuels ou l’art populaire, le cinéma et même aujourd’hui les raisons sociales et la publicité», explique son directeur. Au départ, on s’est surtout intéressé aux comparaisons entre le Québec et les cultures scandinaves et finlandaise, puis avec le monde inuit. On a maintenant adopté une vision circumpolaire, incluant tous les pays du Nord.

«Le thème de la nordicité a ceci de particulièrement intéressant qu’il nous permet de nous comparer à autre chose que la France ou les États-Unis, dit Daniel Chartier. Nous nous définissons toujours comme des Nord-Américains de langue française. Mais nous sommes aussi des nordiques.» Comme dit la chanson, «mon pays, ce n’est pas un pays, c’est l’hiver»…

Il existe peu de liens historiques entre les cultures québécoise et scandinaves. «Pourtant, on voit des ressemblances entre les oeuvres», dit le professeur. Des films comme Mon oncle Antoine, Mémoires affectives ou La grande séduction ont une très grande résonance dans les pays scandinaves, comme il a pu le constater au Festival des cinémas nordiques canadiens qu’il a présenté à Reykjavik, en Islande, l’année dernière.

Grâce aux colloques et autres événements auxquels contribuent les chercheurs du Laboratoire depuis sa création, en 2003, des ponts sont jetés entre cultures nordiques. De l’autre côté de l’Atlantique, la réception est extraordinaire : «La nordicité, un concept inventé au Québec, est devenu le mot d’ordre de toute une recherche parce qu’il définit très bien ce que c’est que de vivre au Nord, de vivre en hiver, affirme Daniel Chartier. On m’a d’ailleurs demandé de codiriger un projet financé par le Conseil de recherche islandais sur l’Islande et les images du Nord.»

Le Laboratoire possède la bibliothèque la plus importante du monde sur l’imaginaire du Nord et publie deux collections d’ouvrages, dont l’une est consacrée aux études culturelles et littéraires, «Droit au pôle», et l’autre, «Jardin de givre», propose des rééditions d’oeuvres significatives liées à l’imaginaire circumpolaire. Grâce aux équipements acquis avec les fonds de la FCI, les chercheurs du Laboratoire ont aussi mis sur pied un ensemble de banques de données (oeuvres, illustrations, citations, extraits vidéo) contenant plus de 30 000 fiches, donnant accès à 100 000 pages d’analyses et à des milliers de représentations du Nord. Une vraie mine d’or pour les prospecteurs de la nordicité.