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Un jeune maestro à l’Ensemble intercontemporain de Paris

Par Claude Gauvreau

2 septembre 2008 à 0 h 09

Mis à jour le 17 avril 2015 à 15 h 04

Il n’a que 26 ans, mais sa feuille de route est impressionnante. De plus, il vient d’être choisi assistant-chef de l’Ensemble intercontemporain de Paris, l’un des orchestres de musique contemporaine les plus prestigieux du monde. Étudiant au doctorat en études et pratiques des arts, Jean-Michaël Lavoie secondera à compter de cet automne la directrice musicale de l’Ensemble, Susanna Mälkki.

Au départ, 47 personnes avaient soumis leur candidature. Le jury, présidé par le compositeur et chef d’orchestre Pierre Boulez, avait invité sept d’entre elles à une audition internationale à Paris, en mars dernier. Trois Français, un Américain et Jean-Michaël Lavoie se sont présentés. Les membres du jury devaient évaluer la qualité de la communication entre les candidats et les musiciens, leur maîtrise de la technique de direction d’orchestre et leur capacité à apporter une signature personnelle. «Nous devions diriger deux partitions musicales. Je suis entré dans une salle en présence de musiciens que je ne connaissais pas… et j’ai plongé, raconte Jean-Michaël. J’ignorais que Boulez serait là. Sa présence m’a un peu déstabilisé au début, puis elle m’a incité à me surpasser.»

Le jeune maestro a commencé par apprendre le piano à l’âge de sept ans et s’y est consacré jusqu’en 2000. Cette année-là, il est invité comme pianiste répétiteur par le Choeur de l’Orchestre Métropolitain et éprouve alors un véritable coup de foudre pour la direction d’orchestre. Aujourd’hui, Jean-Michaël compte à son actif plusieurs concerts à la tête de l’Ensemble de musique contemporaine de l’Université McGill, où il a complété une maîtrise en direction d’orchestre, des invitations de la Société de musique contemporaine du Québec et des prestations dans divers orchestres symphoniques. À l’affût de nouvelles expériences, il a aussi dirigé en juin dernier une soirée musico-littéraire, Les mots enchantés, avec la participation du Chœur de la radio de Radio-Canada, dont il est le directeur artistique adjoint.

Doctorat hors norme

Quelle est la place du chef dans un orchestre et quel rôle joue-t-il précisément dans l’interprétation d’une oeuvre? Ces questions intéressent particulièrement Jean- Michaël qui effectue ses recherches doctorales sur la pratique de la direction d’orchestre. «Mon goût pour la direction d’orchestre est tout récent et m’a pris par surprise, dit-il. Le doctorat en études et pratiques des arts de l’UQAM m’offre la possibilité de combiner les recherches théoriques en musicologie et celles en interprétation, tout en explorant la problématique de la gestuelle comme moyen de communication. C’est à travers cette dernière qu’un chef d’orchestre peut traduire la pensée abstraite d’un compositeur.»

Le jeune étudiant poursuivra son doctorat à distance. Il séjournera un an à Paris avec la possibilité de voir son contrat renouvelé pour une seconde année. À ses yeux, il n’y a pas de contradiction entre la poursuite de ses recherches et ses tâches d’assistant-chef. «Au contraire, les deux s’alimenteront mutuellement, dit-il. J’aurai à remplacer des chefs invités en répétition, à diriger des concerts, à organiser des conférences et des activités pédagogiques.» Chose certaine, le fait d’occuper le poste d’assistant-chef à l’Ensemble intercontemporain de Paris constitue un tremplin vers une carrière prometteuse. «Je me sens privilégié de faire partie d’un orchestre formé de 31 solistes virtuoses, parmi les meilleurs de la planète – des musiciens qui aiment explorer des techniques instrumentales et collaborer à des projets associant musique, danse, théâtre, cinéma, vidéo et arts plastiques.»

Pour Jean-Michaël, la musique contemporaine, que l’on dit difficile d’accès, incorpore les nouvelles technologies et correspond à ce qu’il y a de plus avant-gardiste en musique classique. «Depuis 10 ans, Montréal a produit beaucoup de musiciens qui se spécialisent dans ce domaine. La relève existe et c’est grâce à elle si la musique contemporaine demeure une musique vivante.»

Ambitieux et déterminé, Jean-Michaël Lavoie n’a pas la grosse tête pour autant. «Il faut du temps pour devenir un bon chef d’orchestre, affirme-t-il. Avec l’âge, on apprend à mieux communiquer ses idées aux musiciens. Diriger plusieurs fois les mêmes oeuvres, travailler pendant 20 ans avec les mêmes musiciens fait toute la différence. C’est pourquoi on dit qu’un chef d’orchestre commence à atteindre la maturité vers l’âge de 50 ans!»