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Des visières pour le personnel hospitalier

L’École de design utilise ses imprimantes 3D pour fabriquer du matériel destiné au CHUM.

Par Marie-Claude Bourdon

7 mai 2020 à 17 h 05

Mis à jour le 8 mai 2020 à 10 h 05

Série COVID-19: tous les articles
Les nouvelles sur la situation à l’Université entourant la COVID-19 et les analyses des experts sur la crise sont réunies dans cette série.

La technicienne en travaux pratiques de l’École de design Geneviève Le Guerrier-Aubry essaie une visière fabriquée grâce à l’imprimante 3D.Photo: École de design

Au cours des dernières semaines, l’École de design s’est associée à un réseau constitué par l’École de technologie supérieure (ETS) et d’autres partenaires au sein du collectif SantéLibre. Ce réseau organise la fabrication de visières sur imprimantes 3D et leur distribution au personnel du Centre hospitalier universitaire de Montréal (CHUM). À ce jour, le réseau a acheminé plus de 1000 visières au personnel de l’hôpital.

Pour l’UQAM, tout a commencé juste avant le confinement. L’École de design venait de commander deux nouvelles imprimantes 3D quand l’Université a dû fermer ses portes. Le responsable de l’atelier multitechnique, Mario Baillargeon, a alors eu l’idée de détourner la commande pour la faire livrer chez sa collègue, la technicienne Geneviève Le Guerrier-Aubry. Elle profiterait des deux semaines de confinement (prévues au départ) pour assembler les imprimantes et se familiariser avec l’équipement. 

Puis, la crise de la Covid-19 a pris de l’ampleur. Des annonces concernant le manque de matériel médical dans les hôpitaux, notamment de visières, sont apparues sur le web. «Je me suis dit que nous avions de l’équipement et des compétences et j’ai commencé à chercher comment nous pouvions contribuer rapidement à répondre à ces besoins, raconte le directeur de l’École de design, Maurice Cloutier. Plutôt que de concevoir nous-mêmes une visière, ce qui aurait été très long, nous avons saisi l’occasion de collaborer au réseau de l’ETS, coordonné par le professeur Jacques A. de Guise.»

C’est par l’entremise de Caroline Chartrand, cadre-conseil au Vice-rectorat à la recherche, à la création et à la diffusion, que Maurice Cloutier a eu vent de l’initiative de l’ETS. Connue sous le nom de Covi3d, pour «Création ouverte et vivante en impression 3D», cette initiative regroupe des chercheurs de l’ETS, du Centre de recherche du CHUM, de divers CIUSS, mais aussi des partenaires industriels, des entreprises d’économie sociale et même de simples citoyens possédant des imprimantes 3D. Elle a pour objectif d’arrimer les besoins en matériel du milieu hospitalier aux infrastructures 3D existantes. L’initiative, qui ne comptait qu’une dizaine de partenaires au départ, en regroupe aujourd’hui une centaine, ce qui permet d’augmenter la cadence des livraisons.

C’est l’arceau utilisé pour fixer la visière sur la tête qui est fabriqué par impression 3D.Photo: École de design

«Les visières sont fabriquées selon un design qui est libre de droits et disponible en open sourcesur le web, précise Maurice Cloutier. La fabrication, l’emballage et la livraison sont extrêmement codifiés et normés pour respecter les normes de sécurité.»

Avant de se lancer dans la production comme telle, Geneviève Le Guerrier-Aubry a dû tester les équipements et calibrer l’impression. Pour éviter les imperfections, le processus qui permet d’obtenir une pièce (voir la vidéo de l’imprimante à l’œuvre) à partir de la matière première, un fil de plastique biodégradable, doit être extrêmement précis. 

Ce n’est pas la visière comme telle, une pellicule d’acétate, qui sort des imprimantes de l’École de design, mais plutôt l’arceau de soutien utilisé pour la fixer sur la tête. «On ne parle pas d’une production industrielle, note Maurice Cloutier. Chaque arceau demande plus ou moins deux heures d’impression!»

Pour augmenter sa capacité de production, l’École de design attend la livraison de deux autres imprimantes 3D, annonce son directeur. Avec ses collègues, Maurice Cloutier s’est également lancé dans un projet d’amélioration des visières. En plus de Geneviève Le Guerrier-Aubry et de Mario Baillargeon, un autre technicien, Raphaël Millette, et le professeur Guillaume Sasseville se sont joints au projet. 

«Si nous parvenons à perfectionner le produit, nous partagerons nos résultats avec le collectif SantéLibre», précise Maurice Cloutier. Ce collectif est une plateforme web regroupant chercheurs, ingénieurs, experts du domaine de la santé et designers qui s’est donné pour défi de répondre aux besoins en matériel du système de santé québécois.

Dès que son équipe aura accès à l’atelier multitechnique de l’École, Maurice Cloutier souhaite également travailler sur un prototype de visière qui pourrait éventuellement servir aux étudiants en design lors du retour à l’université, et peut-être à certains membres du personnel qui sont en contact avec le public. L’atelier multitechnique dispose, en effet, d’un équipement de découpe au laser qui pourra être utilisé pour tailler les pièces d’acétate des visières.

Maurice Cloutier souligne l’enthousiasme des membres de l’École de design qui collaborent à ce projet. «Il a fallu énormément d’échanges de courriel, de réunions sur Zoom et d’heures de travail pour mettre tout cela en branle, confie le directeur. Tout le monde a participé avec beaucoup de générosité et je suis heureux que nous puissions contribuer à l’effort en sachant que le matériel que nous produisons répond vraiment aux besoins du personnel soignant.»