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Le recteur de l’UQAM s’adresse aux membres de la communauté universitaire

15 décembre 2008 à 5 h 12

Mis à jour le 6 octobre 2010 à 14 h 10

Le recteur Claude Corbo a envoyé aujourd’hui aux membres de la communauté de l’UQAM un message personnel visant à les informer de la situation de l’Université.

Le texte de M. Corbo est reproduit ici dans son intégralité :

«Au moment où s’achève l’année 2008, je prends la liberté de m’adresser à vous de façon toute personnelle. Je sais que nombre de membres de notre communauté universitaire ont vécu les derniers mois avec impatience et inquiétude. Et j’entends aussi que l’avenir est source de nouveaux questionnements, de nouvelles appréhensions. C’est pourquoi je m’adresse à vous. C’est pourquoi je vous demande de me lire attentivement.

Je vous propose un ensemble d’informations qui vous permettront, j’en suis convaincu, de mieux comprendre la situation de notre Université.

Mon propos vise, précisément, à répondre à trois questions. D’où arrivons-nous? Où sommes-nous rendus? Où allons-nous?

D’où arrivons-nous?
UNE SITUATION POTENTIELLEMENT CATASTROPHIQUE

Pour répondre à cette question, remontons en arrière de 18 mois, jusqu’en mai 2007. À ce moment, l’UQAM était dans une situation désolante et potentiellement catastrophique :

  • L’UQAM avait la responsabilité de la dette totale de l’Îlot Voyageur, 142 M $;
  • L’UQAM avait la responsabilité de la dette totale du Complexe des Sciences, 180 M $;
  • L’UQAM allait être privée de 85 M $ de subventions de fonctionnement;
  • L’UQAM venait d’adopter un budget pour 2007-2008 prévoyant un déficit d’opération de 31 M $ s’ajoutant au déficit accumulé de 26 M $ au 31 mai 2007 (et s’ajoutant évidemment aux dettes immobilières);
  • L’UQAM était sur le point de se faire refuser un premier plan de redressement par la ministre de l’Éducation;
  • L’UQAM était gravement discréditée auprès de la population, des autres universités et du gouvernement pour sa dérive immobilière;
  • L’UQAM s’apprêtait à subir un examen par le Vérificateur général du Québec;
  • L’UQAM était fragilisée par une direction intérimaire et un Conseil d’administration gravement éprouvés par la dérive immobilière;
  • L’UQAM était face à un horizon totalement obscur.

En d’autres termes, même si cela ne semblait pas nous affecter directement dans notre quotidien comme membres de la communauté de l’UQAM – et je dis cela en connaissance de cause parce qu’au mois de mai 2007 j’étais moi-même professeur au Département de science politique – en mai 2007, donc, notre université était vraiment dans une crise très importante et une situation très dangereuse.

Au cours des derniers 18 mois, la situation de l’UQAM a beaucoup évolué et pour le mieux. Il est important de le mesurer. Voyons où nous en sommes aujourd’hui.

Où sommes-nous rendus aujourd’hui?
DES DÉVELOPPEMENTS POSITIFS

En ces derniers jours de 2008, nous constatons que la liste des développements positifs concernant la situation de l’UQAM est très considérable et très encourageante :

  • Le 31 août 2007, la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport rendait publique la décision du gouvernement de tenir l’UQAM indemne des conséquences du projet de l’Îlot Voyageur. De plus, le 13 novembre 2008, le gouvernement confirmait la création d’une fiducie dotée d’un capital de 200 M $ pour tenir l’UQAM indemne de l’Îlot Voyageur.
  • Le 9 octobre 2008, la ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport rendait publique la décision du gouvernement de libérer 85 M $ de subventions de fonctionnement retenues depuis 2005-2006 (moins une avance de 20 M $ consentie en septembre 2007) et, surtout, de verser à l’UQAM le montant de 180 M $ que nous réclamions pour le Complexe des Sciences. En contrepartie, le Conseil d’administration a pris à l’unanimité l’engagement de produire un plan assurant le retour à l’équilibre budgétaire d’ici 2013-2014.
  • Par ailleurs, l’exercice 2007-2008 se clôt par un déficit de 21 M $, dix millions de moins que prévu en mai 2007. La majeure partie du déficit 2007-2008 (17 M $) est imputable aux frais financiers.
  • La direction de l’UQAM a été renouvelée. Le gouvernement a aussi nommé de nouveaux membres au Conseil d’administration.
  • Depuis un an et demi, l’UQAM a retrouvé sa crédibilité.

EFFET DIRECT DE CES DÉVELOPPEMENTS

Ces développements, particulièrement les décisions du gouvernement concernant les dettes immobilières de notre université, ont un effet direct : la pérennité de l’UQAM est assurée. Notre Université ne sera pas étranglée par des dettes immobilières à résorber. Nous pouvons tourner la sombre page de la dérive immobilière.

Un autre développement s’est ajouté le 5 décembre 2008. Le Conseil d’administration a accepté de signer une entente avec le Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport. Cette entente, il faut le signaler, ne concerne pas les affaires académiques; en ces matières, l’UQAM conserve sa pleine autonomie. Cette entente définit les modalités selon lesquelles l’UQAM réalisera son engagement de parvenir à l’équilibre budgétaire d’ici 2013-2014. Surtout, cette entente oblige le MELS à remettre à l’UQAM, avant la fin de décembre, un montant de 65 M $ en subventions retenues et de préciser, dans les premiers mois de 2009, quand et comment seront décaissés les 180 M $ annoncés pour le Complexe des sciences.

Ainsi, un autre pas est franchi dans le redressement de l’UQAM : nous commençons à voir quand et comment l’argent promis se retrouvera dans nos coffres.

Nous devons donc nous encourager de ces changements très positifs dans la situation de l’UQAM. Le naufrage est évité.

Mais la mer demeure houleuse

TOUT N’EST PAS RÉGLÉ

En effet, tout n’est pas réglé. Et plusieurs membres de notre communauté, après avoir poussé un grand soupir de soulagement, ne s’expliquent tout simplement pas que l’on parle encore de problèmes financiers, de compressions budgétaires, de suppressions de postes.

«Comment se fait-il, demandent ces membres, que tout l’argent annoncé par le gouvernement – 200 M $ pour l’Îlot Voyageur, 180 M $ pour le Complexe des Sciences, 85 M $ de subventions retenues – que tout cet argent ne règle pas tous nos problèmes financiers? Pourquoi faudrait-il encore payer, entre autres par des abolitions de postes?»

Voilà de sérieuses questions. Il faut y répondre.

DES PROBLÈMES PERSISTANTS

Hélas! la vérité m’oblige à dire que tout n’est pas réglé. Très concrètement, même si l’UQAM est débarrassée, pour l’essentiel, du poids financier de la dérive immobilière, il demeurera environ 100 M $ de dettes à financer, principalement dues au déficit accumulé de 65 M $. Ce qui est encore plus important, c’est que la structure de coûts de fonctionnement (masses salariales et autres dépenses) est telle que les dépenses courantes d’opération de l’UQAM ont tendance à dépasser, année après année, ses revenus courants. En somme, il y a plus de dépenses que de revenus. En d’autres termes, les effets financiers de la dérive immobilière ont, en quelque sorte, caché des problèmes structurels dans le financement des opérations. Cela s’explique.

En effet, environ 80 % des revenus de l’UQAM proviennent des effectifs étudiants alors que les masses salariales représentent à peu près 80 % des dépenses. Or, depuis quelques années, nos effectifs étudiants sont stables et même en légère décroissance*, alors que les masses salariales augmentent ** et ce, pour diverses raisons (ajouts de postes, nouvelles embauches, progression des personnes dans les échelles, etc.) sans que l’indexation des subventions soit à la hauteur de la croissance des masses salariales. Certes, des ajouts ont été consentis (par exemple le refinancement des universités) et des corrections ont été faites par le gouvernement du Québec, mais pas de façon suffisante.

Il y a donc nécessité de faire tous les efforts nécessaires pour que nos dépenses de fonctionnement ne dépassent pas nos revenus. Il n’est tout simplement ni possible ni défendable de répéter année après année des déficits liés à notre fonctionnement (plutôt qu’à la dérive immobilière).

Après s’être arrachée aux sables mouvants de la dérive immobilière, l’UQAM ne peut pas et ne veut certainement pas se laisser noyer dans une dérive financière irresponsable.

Où allons-nous?
UN TRAVAIL À FINIR

Des tâches prioritaires majeures nécessiteront des efforts soutenus au cours des prochains mois :

  • Préparer, comme à chaque année, un budget révisé selon les données observées au 30 novembre, en identifiant les variations de revenus et de dépenses depuis le 1er juin. Ce budget révisé sera soumis au Conseil d’administration du 27 janvier prochain et permettra notre fonctionnement jusqu’au 31 mai 2009. D’ici le dépôt du projet de budget révisé, des incertitudes subsistent sur l’état de notre santé financière et sur les actions prévisibles pour éviter la dérive financière.
  • Déployer tous les efforts nécessaires, de façon méthodique et concertée, pour assurer une réelle croissance de nos effectifs étudiants dès l’année 2009-2010. Un étudiant équivalent temps plein (EETP) rapporte, en moyenne et tous cycles confondus, 10 000 $ à l’Université. Il faut s’en occuper vite et efficacement. Un groupe de travail est déjà à l’œuvre.
  • Mettre au point, sur la base d’une lecture précise de la situation financière rendue possible par le budget révisé 2008-2009, un plan assurant le retour à l’équilibre budgétaire d’ici 2013-2014. Le Conseil d’administration a pris cet engagement, à l’unanimité, le 9 octobre 2008, comme condition d’obtention de l’aide financière de 180 M $ plus 85 M $ du gouvernement.
  • Engager les actions nécessaires pour faire modifier la formule de financement des universités par le MELS. Cette formule n’avantage pas l’UQAM. La formule que le MELS utilise pour partager les subventions entre les universités, je dois le rappeler, a été approuvée par l’ancien recteur malgré qu’elle fûtpréjudiciable pourl’UQAM. Cela n’aide pas notre cause. Le succès dans cette entreprise n’est donc pas garanti et pourra prendre du temps. Mais un comité du Conseil d’administration y travaille.

Tout en poursuivant ces tâches, il faudra aussi :

Mener à bon port la négociation des conventions collectives en cours;

Préparer le Plan stratégique 2009-2014;

Trouver la meilleure solution pour l’intégration définitive de la TÉLUQ à l’UQAM;

Finaliser le processus de facultarisation.

Il s’agit là, bien sûr,  d’un menu exigeant qui commandera effort, créativité et collaboration de la part de tous les membres de notre communauté. Nous n’avons toutefois d’autres choix. Le gouvernement juge qu’il a fait sa part :il a assuré à l’UQAM une contribution de 465 M $. Il s’attend à ce que l’UQAM s’aide elle-même. D’où la nécessité d’agir.

Entretemps,  y aura-t-il des abolitions de postes et des mises à pied?

Cela, je vous le confirme à mon très grand regret, demeure un scénario tout à fait possible.Il s’agit toutefois, à ce moment-ci, d’un scénario. Il nous faut en effet notamment attendre une lecture définitive des données budgétaires pour l’année 2008-2009 et avoir une idée un peu plus précise de la situation pour les années à venir pour pouvoir juger de la nature et de l’ampleur des compressions à effectuer. Je peux toutefois vous assurer que la direction de  l’UQAM ne se résoudra à effectuer de telles compressions qu’à contre-cœur, celles-ci demeurant la dernière mesure à retenir.

À cet effet, les mesures de compressions de personnels qui devaient être annoncées au retour du congé des Fêtes sont suspendues le temps de finaliser les données budgétaires 2008-2009.

Une chose est certaine : il faut vraiment faire tous les efforts nécessaires pour atteindre et maintenir l’équilibre budgétaire. Cela veut dire autant accroître les revenus que réduire les dépenses. Accumuler les déficits de fonctionnement, année après année, je dois vous le dire, nous plongerait inévitablement dans une spirale d’endettement qui conduirait fatalement à de plus importantes compressions et à de plus brutales mises à pied.

Conclusion

Je conclus brièvement en vous rappelant des choses essentielles :

  1. La vie académique, le cœur de notre université, va très bien et déborde de vitalité et c’est grâce à la patience, à la générosité et au sentiment d’appartenance de chacun des membres de notre communauté que les étudiantes et les étudiants trouvent ici un milieu d’étude et de vie stimulant et propice à la réussite.
  2. La situation d’ensemble de l’UQAM s’est véritablement améliorée depuis 18 mois. L’UQAM n’est plus en train de se noyer dans les sables mouvants de la dérive immobilière. Sa pérennité est assurée.
  3. Nous pouvons et nous devons améliorer la structure financière de notre Université. La communauté de l’UQAM est capable de relever ce défi. Elle doit, à cet effet, de façon prioritaire, déployer tous les efforts requis pour augmenter sa clientèle étudiante, notamment aux cycles supérieurs, et s’assurer que celles et ceux qui ont fait le choix de l’UQAM pour leur cheminement académique poursuivent leurs études en nos murs.

Voilà les messages que je voulais vous livrer. Lors de ma candidature au poste de recteur, à l’automne 2007, je vous avais promis que je vous dirais les choses clairement. Tout au long de ces 12 derniers mois, j’ai tenté de tenir parole. Aujourd’hui, je vous trace un bilan réaliste de notre situation.

En terminant, au nom de la Direction et en mon nom personnel, je vous souhaite de joyeuses Fêtes. Nous savons que les prochains mois à l’UQAM seront encore difficiles. Je vous assure que la Direction ne ménagera aucun effort pour que l’avenir de l’UQAM, pour que votre avenir, s’inscrive dans une perspective positive.»

* Effectifs étudiants équivalents temps plein (EETP)

   2003-2004    25 398

   2004-2005    25 370

   2005-2006    25 427

   2006-2007    25 215

   2007-2008    24 786

   2008-2009    24 630

   2007-2008 / 2003-2004 : -2,41 %

** Masses salariales avec avantages sociaux

   2003-2004    223 950 959 $

   2004-2005    234 146 920 $   +4,5 %

   2005-2006    242 473 682 $   +3,5 %

   2006-2007    253 918 399 $   +4,7 %

   2007-2008    256 706 792 $   +1,09 %

   2007-2008 / 2003-2004 : +14,63 %