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Échec et mat!

Par Valérie Martin

29 novembre 2010 à 0 h 11

Mis à jour le 17 avril 2015 à 15 h 04

Le joueur d’échecs Thomas Roussel Roozmon était étrangement calme lors du dernier Championnat du monde par équipe, qui s’est déroulé en octobre dernier en Sibérie. «Même si je n’avais pas joué depuis quelques temps, j’étais moins stressé qu’à l’habitude. C’est ce qui a sans doute contribué à ma victoire», dit-il à propos de sa meilleure performance à vie. Pendant ce tournoi, il a amassé un nombre suffisant de points pour se voir décerner, par la Fédération internationale des échecs (FIDE), le titre de grand maître international, la plus haute distinction qu’un joueur puisse recevoir. Il est le quatrième Canadien à l’avoir obtenu.

«Être grand maître international, c’est un peu l’équivalent d’être docteur. C’est l’aboutissement de plusieurs années de travail et c’est un titre à vie», explique celui qui a commencé à jouer aux échecs à l’âge de cinq ans. «Comme j’ai toujours préféré les jeux de stratégie, je me suis naturellement tourné vers les échecs.» Il semble y avoir une légère discorde entre son père et sa grand-mère pour savoir qui lui a appris à jouer le premier. «Quoi qu’il en soit, j’ai fini par les battre tous les deux!», lance le nouveau grand maître en riant.

De compétitions locales en championnats nationaux et internationaux, Thomas Roussel Roozmon gravit rapidement les échelons et remporte à 16 ans le titre de maître international aux échecs. Ce sera l’ultime étape avant de décrocher le titre prestigieux qu’il détient aujourd’hui. «Adolescent, je jouais énormément aux échecs, je participais en moyenne à deux tournois à l’étranger, par année. C’est durant cette période que j’ai pu m’accomplir en tant que joueur.»

Même s’il se dit mauvais perdant, le jeune homme est loin du joueur colérique qui hurlerait des obscénités aux juges ou lancerait son jeu d’échecs dans les airs en signe de désapprobation. «Ce n’est pas le milieu pour cela. Les joueurs ne sont pas très expressifs!», s’exclame-t-il. Un championnat d’échecs se déroule dans un silence le plus total. On entendrait une mouche voler… «Chaque joueur est dans sa bulle et se concentre dans le but de battre son adversaire. C’est une forme de lutte non-violente, observe Thomas Roussel Roozmon. Lorsque je joue, j’oublie tous mes problèmes, je suis dans le moment présent.»

Entraînement sur ordinateur

La routine d’un joueur d’échec peut s’apparenter à celle d’un sportif. Certains ont des entraîneurs pour renforcer, par exemple, leur motivation. Comme le bassin de joueurs d’élite est assez restreint au Canada, il est difficile de trouver un entraîneur qualifié. Pour «s’entraîner», Thomas Roussel Roozmon utilise un logiciel. «Le programme analyse mes parties et me fait des suggestions. J’utilise aussi une base de données dans laquelle se retrouvent toutes les statistiques des parties d’échecs disputées dans le monde, ce qui est fort utile pour analyser mes adversaires.» Si le jeune homme n’a pas de routine et ne se livre à aucune préparation mentale avant une compétition, il admet toutefois avoir quelques chemises «chanceuses» dans sa garde-robe… «Si j’ai gagné un match en portant telle chemise, c’est certain que je vais la remettre lors du prochain», rigole-t-il.

Entre les tournois à l’étranger et les cours d’échecs qu’il donne à des joueurs de tous âges, Thomas Roussel Roozmon trouve le temps d’étudier en philosophie à l’UQAM. «Après avoir toujours étudié en sciences, j’avais envie d’explorer un domaine différent, d’accroître ma culture générale, dit cet ancien étudiant en mathématiques et économie de l’Université de Montréal. Et l’UQAM, c’est plus proche de tout.» Envisage-t-il une carrière comme joueur d’échecs? «Pour cela, il faudrait que je déménage en Europe, la plupart des tournois se déroulent là-bas. J’y pense.» Il avoue avoir de la difficulté à faire des choix. «Il y a trop de choses qui m’intéressent : j’ai envie de voyager en Asie, de prendre des cours de russe… et il faudrait que je termine mon baccalauréat!»