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Un carrefour de la vie culturelle

La Faculté des arts organise un colloque pour souligner les 50 ans de la Place des Arts.

Par Claude Gauvreau

4 novembre 2013 à 15 h 11

Mis à jour le 17 septembre 2014 à 19 h 09

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Exposition sur les 50 ans de la Place des Arts conçue par l’atelier La Camaraderie.

De 1963 jusqu’à maintenant, plus de 45 millions de spectateurs ont franchi les portes de la Place des Arts pour voir et entendre de grands artistes d’ici et d’ailleurs. Avec ses six salles de spectacles et le Musée d’art contemporain de Montréal, le quadrilatère de la Place des Arts constitue le plus grand complexe culturel au Canada.

Pour souligner les 50 ans de ce carrefour de la vie culturelle montréalaise, la Faculté des arts organise un colloque interuniversitaire, les 7 et 8 novembre prochains, en collaboration avec la Place des Arts, Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) et l’Institut du patrimoine de l’UQAM. Se déroulant à la Cinquième Salle de la Place des Arts, le colloque réunira des conférenciers de l’UQAM, de l’Université de Montréal et de l’Université McGill, qui examineront les impacts culturel, artistique, social et urbanistique de la Place des Arts.

«Cet événement s’inscrit dans le cadre d’un protocole d’échanges conclu entre l’UQAM et la Place des Arts à l’automne 2012, souligne Louise Poissant, doyenne de la Faculté des arts. Claude Corbo, qui était alors recteur de l’Université, a eu l’idée de tenir ce colloque.»

Une naissance difficile

Jean-Christian Pleau, vice-doyen aux études de la Faculté des arts et professeur au Département d’études littéraires, donnera une conférence sur la controverse ayant entouré l’inauguration de la Place des Arts.

Le 21 septembre 1963, date de l’inauguration, la gauche nationaliste québécoise avait organisé une grande manifestation dans les rues de Montréal. Durement réprimée par les forces policières, la manifestation rassemblait des centaines de personnes opposées à ce qu’elles estimaient être un éléphant blanc réservé à l’élite : la «Place des autres», comme on la surnommait.

«Pour plusieurs jeunes intellectuels de l’époque, la Place des Arts n’est que la manifestation ostentatoire d’une culture bourgeoise, explique Jean-Christian Pleau. Le coût des billets pour le gala d’ouverture est de 100 dollars, une somme importante à l’époque. Comme les billets ne se vendent pas, le maire de Montréal, Jean Drapeau, décide de les distribuer gratuitement.»

Le maire Drapeau avait confié la gestion du projet à un organisme privé, la Corporation Sir-Georges-Étienne-Cartier, financée par la ville de Montréal, le gouvernement du Québec et des hommes d’affaires influents, rappelle le professeur. «La Corporation voulait signer une entente avec l’association américaine Actor’s Equity plutôt qu’avec la nouvelle Union des artistes (UDA). Cette dernière tenait à ce que la Place des Arts privilégie les productions culturelles québécoises dans sa programmation.» Dans les semaines précédant l’inauguration, un conflit éclate entre les deux associations. L’intervention in extremis du gouvernement libéral, en particulier de l’un de ses ministres, René Lévesque, permet d’arriver à une entente qui donne raison à l’UDA. Un an plus tard, la Corporation privée est dissoute et remplacée par un organisme public, la Société de la Place des Arts. Pour Jean-Christian Pleau, «l’enjeu derrière ce conflit était l’affirmation nationale et culturelle des Québécois francophones face à la domination anglo-américaine.»

Un impact culturel majeur

Selon Louise Poissant, l’impact culturel de la Place des Arts, au fil des ans, a été considérable. «Au début des années 60, comme la plupart des grandes villes d’Amérique du Nord, Montréal souhaitait se doter d’un centre d’arts d’envergure, rappelle la doyenne. Il y avait à cette époque un véritable élan pour la création de grands centres culturels, à l’image du Lincoln Center à New York, où se rencontreraient toutes les formes d’art : musique classique et populaire, danse, opéra, théâtre.» La Place des arts a non seulement accueilli de grands artistes de partout à travers le monde, mais elle a nourri la vie culturelle québécoise en permettant à des artistes locaux, venus de tous les horizons, de se produire sur ses planches. «En ce sens, elle a contribué à la démocratisation de la culture», observe Louise Poissant

La Place des Arts se trouve aujourd’hui au coeur du Quartier des spectacles dont l’expansion a favorisé la multiplication d’interventions artistiques et culturelles dans l’espace de la rue. «L’augmentation et la diversification de l’offre de biens culturels contribue à sensibiliser davantage de gens à différentes dimensions de la vie artistique», souligne la doyenne.

Pour célébrer son cinquantième anniversaire, la Place des Arts a invité le public à une exposition immersive située dans l’espace culturel Georges-Émile-Lapalme, du 9 septembre au 27 octobre derniers. Conçue par l’atelier de design La Camaraderie, dont la directrice artistique est Albane Guy (DESS design d’événements, 2011), l’exposition permettait aux visiteurs de participer à la création d’un grand poème collectif. La composition se faisait sur iPad et suivait le principe du cadavre exquis. Chaque participant composait un vers à partir de l’amorce «La Place des Arts m’inspire…», ou en tenant compte des deux derniers mots de la ligne précédente.