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Les Jardins de Bakel

Dominique Guay a créé un projet de culture maraîchère pour aider des Sénégalaises à nourrir leurs proches.

Par Pierre-Etienne Caza

2 octobre 2018 à 11 h 10

Mis à jour le 2 octobre 2018 à 15 h 10

C’est lors d’un stage dans le cadre de son bac en animation et recherche culturelles que Dominique Guay (B.A. animation et recherche culturelles, 2016) a découvert le Sénégal. Ce programme, l’un des plus anciens de l’université, a été revampé et rebaptisé depuis l’automne 2017. «C’est une formation polyvalente qui nous outille afin de concevoir des projets, ici ou à l’étranger, qui peuvent changer la vie des gens», affirme la diplômée qui, depuis la fin de son bac, partage son temps entre le Québec et l’Afrique, où elle mène un projet baptisé Les Jardins de Bakel.

En 2015, lors de son stage au centre communautaire de Bakel, une ville isolée située sur la frontière avec la Mauritanie, tout près du Mali, l’étudiante a œuvré auprès de différents groupes de femmes. L’idée de son projet lui est venue en rendant visite au propriétaire d’un grand jardin. «Cet homme m’a expliqué que les femmes lui achetaient des légumes afin de les revendre au marché et d’ainsi assurer leur subsistance. Pour moi, c’était un non-sens que ces femmes ne puissent cultiver elles-mêmes leurs légumes pour les consommer et vendre ensuite leurs surplus. Mais, pour cela, elles avaient besoin d’avoir accès à des terres, à des semences, à des outils et à de l’eau.»

Dominique Guay en a fait son projet. À son retour au pays, au printemps 2016, elle s’est inscrite à un DEP en horticulture afin d’ajouter cette corde à son arc. «J’ai gardé des liens avec les gens de Bakel pendant toute cette période, peaufinant mentalement mon projet de jardins maraîchers», se rappelle-t-elle.

À l’été 2017, elle repartait au Sénégal avec l’aide financière des Offices jeunesses internationaux du  Québec (LOJIQ). «Mon objectif était de dénicher des terres cultivables et des partenaires pour l’aventure et de mettre le projet sur les rails», précise-t-elle.

Deux parcelles cultivables

Elle a réussi à atteindre ses objectifs: deux groupes, l’un comptant entre 30 et 40 femmes et l’autre entre 20 et 30, ont désormais accès à des parcelles cultivables. «Pour que ces femmes puissent signer une entente d’exploitation agricole pour ces terrains, il a fallu les enregistrer officiellement à titre de Groupement d’intérêt économique (GIE), qui est l’équivalent de notre statut d’organisme à but non lucratif (OBNL), explique-t-elle. Cela leur a donné le droit d’ouvrir un compte bancaire et d’être reconnues au sein d’un regroupement économique d’Afrique de l’Ouest donnant accès à certains programmes d’aide.»

Avec les fonds récoltés lors d’une activité de financement réalisée au Québec avant son départ, Dominique Guay a pu amorcer les travaux sur les parcelles afin de réparer un puits et d’améliorer le système de pompage de l’un des terrains. «Grâce à un financement du Groupe de recherche Migration-Citoyenneté-Développement, une association internationale de droit français composée de professionnels – agronomes, économistes, sociologues, géographes, urbanistes et travailleurs sociaux – qui mettent leur savoir-faire au service des populations d’Europe et d’Afrique, nous avons obtenu des semences, des outils… et des clôtures, car il faut empêcher les ânes et les chèvres de manger les récoltes!»

Dans leurs jardins, les femmes de Bakel font désormais pousser de la laitue, du chou, des oignons, des concombres, des carottes, des tomates, des aubergines, des poivrons et des piments. «Il y a aussi des arbres fruitiers, ajoute Dominique Guay. Nous tentons d’adapter les cultures selon les saisons, car Bakel est située dans un climat semi-aride. Avant la saison des pluies – qui dure quatre mois –, le mercure peut grimper jusqu’à 50 degrés Celsius et, en période de sécheresse, ce ne sont pas tous les cultivars qui survivent. Nous voulons également créer des bassins pour retenir et utiliser au maximum les eaux de pluie.»

Sociofinancement

Revenue au Québec au printemps dernier, Dominique Guay poursuit ses démarches pour consolider le projet, tout en travaillant comme chargée de projet chez Sentier Urbain, un organisme communautaire de verdissement social. En septembre, elle a organisé à Montréal une levée de fonds festive pour les Jardins de Bakel, avec cours de danse et nourriture sénégalaises. «Avant de retourner là-bas, en février prochain, j’aimerais avoir l’argent nécessaire pour installer un meilleur système de pompage utilisant des panneaux solaires», précise-t-elle.

L’entrepreneure sociale compte lancer une nouvelle campagne de sociofinancement en novembre. «Je viens d’envoyer les formulaires officiels pour créer l’OBNL Les Jardins de Bakel, souligne-t-elle fièrement. Cela facilitera notamment l’échange de fonds avec les deux groupes de femmes au Sénégal.» Une histoire à suivre!