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Une carrière au service des jeunes

Lauréat 2019 du prix Reconnaissance pour la Faculté des sciences de l’éducation, Claude Daviau est un fervent défenseur du système d’éducation québécois. 

Par Pierre-Etienne Caza

29 avril 2019 à 10 h 04

Mis à jour le 7 juin 2022 à 10 h 39

Série Prix Reconnaissance UQAM 2019
Sept diplômés de l’UQAM seront honorés à l’occasion de la Soirée Trajectoires 2019 pour leur cheminement exemplaire et leur engagement. Ce texte est le troisième d’une série de sept articles présentant les lauréats.

Claude DaviauPhoto: Nathalie St-Pierre

L’ancien directeur général adjoint de la Commission scolaire de Montréal (CSDM) Claude Daviau (B.Sc. enseignement en activité physique, 1986) a enseigné pendant quelques années à l’école Saint-Henri, dans son quartier de naissance, avant de devenir conseiller pédagogique, puis directeur de l’école secondaire Honoré-Mercier, dans le sud-ouest de Montréal. «J’ai toujours travaillé en milieu défavorisé, souligne-t-il. Je suis un adepte de l’école communautaire, qui s’inscrit dans un quartier et qui prend en considération tous les élèves, peu importe leurs difficultés, en collaboration avec les autres ressources comme la Maison des jeunes et le centre de loisirs. Quand tout le monde est dévoué à la cause des jeunes, on peut atteindre une synergie fantastique.»

Les fondements de la pédagogie abordés durant le baccalauréat d’enseignement en activité physique ont influencé durablement Claude Daviau, en plus de lui donner une longueur d’avance sur les diplômés des autres universités. «L’arrimage de nos études avec le programme mis en place à l’époque par le ministère de l’Éducation était novateur et unique à l’UQAM, se rappelle le lauréat. En plus, j’ai eu la chance d’avoir de très bons professeurs, parmi lesquels André Huppé, Christian Pelchat et Jean-Claude Brief.»

Claude Daviau a toujours conservé des liens étroits avec son alma mater. Il s’est impliqué pendant quelques années dans le Conseil de module en éducation physique à titre de représentant du milieu socioéconomique et il a participé, entre autres, à différents travaux du Centre interdisciplinaire de recherche sur l’apprentissage et le développement en éducation (CIRADE) et de la Chaire UNESCO de développement curriculaire. «Tout au long de ma carrière, je me suis fait un devoir et une fierté d’engager des diplômés de l’UQAM», ajoute-t-il.

Les années de la réforme

Claude Daviau était coordinateur des services éducatifs à la CSDM lors de l’implantation de la réforme au préscolaire, au primaire et au secondaire au début des années 2000. «Contrairement à certaines croyances, il n’y a pas eu de génération sacrifiée, affirme-t-il sans détour. La réforme a simplement légitimé ce qui se faisait de mieux dans nos écoles et ailleurs sur la planète en matière d’autonomie des élèves et de développement des compétences. À l’époque où nous avons pris ce virage, nous étions à l’avant-garde au niveau mondial.»

Le gestionnaire reconnaît que l’implantation aurait pu être mieux planifiée, notamment en ce qui concerne l’accompagnement des enseignants. «La résistance au changement était grande, rappelle-t-il toutefois. La formation continue n’est pas très prisée au sein de la profession enseignante…»

Son intérêt pour les nouvelles technologies l’a poussé à accepter en 2005 un poste de coordinateur au service des ressources informatiques de la CSDM. «Le Bureau de développement des TIC en pédagogie venait d’être créé et son mandat était de soutenir les enseignants dans leurs usages des nouvelles technologies dans les salles de classe», explique Claude Daviau. Presque 15 ans plus tard, il estime que les TIC n’ont pas encore été intégrées adéquatement dans l’ensemble du réseau scolaire québécois. «On ne peut pourtant pas faire abstraction des nouveaux outils technologiques, dit-il. Les jeunes les utilisent massivement et il faudrait que cela se reflète davantage dans les méthodes pédagogiques.»

Le processus de négociation

Après avoir été directeur du Réseau des établissements scolaires Sud à la CSDM, de 2010 à 2013, Claude Daviau a fait le saut au comité patronal de négociation du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur lors du renouvellement de la convention collective des enseignants. «Dans ma carrière de gestionnaire, je n’avais jamais eu besoin de “mettre mon nez” dans la convention collective, comme on dit. Participer au processus de négociation m’a permis de comprendre les limites et les contraintes d’un tel outil. J’ai eu la chance d’entendre différentes perspectives, d’observer les jeux de coulisses et les tractations.»

Lors de cette négociation, Claude Daviau a fréquenté des gens qui, tant du côté patronal que syndical, croient profondément à la mission du réseau de l’éducation. Il formule tout de même un bémol: la convention collective favorise, selon lui, une approche techniciste de l’enseignement. «Les enseignants se protègent et cela devient contre-productif, déplore-t-il. La convention encadre, par exemple, les moments où la direction de l’école peut rencontrer un enseignant – c’est-à-dire à l’intérieur de sa charge de travail. Mais ça ne fonctionne pas comme ça dans la réalité. Il y a souvent des dossiers qui se règlent au cours de conversations qui surviennent dans le corridor lors d’une rencontre impromptue.»

Le même raisonnement s’applique aux relations avec les élèves, poursuit Claude Daviau. «Lorsque j’enseignais, je ne pouvais pas limiter mes interactions avec les élèves aux moments qu’ils passaient avec moi dans le gymnase. Je les croisais dans l’école à d’autres moments de la journée, ou même dans le quartier, et je devais être disponible pour eux si c’était nécessaire. L’éducation n’est pas une question de minutes, c’est une question d’implication et d’échanges avec les élèves.»

Claude Daviau ne remet pas en question l’utilité des conventions collectives, au demeurant incontournables pour encadrer les relations de travail, mais il déplore le manque de flexibilité et d’ouverture dans le processus. «Il y a des acquis, de part et d’autre, qui semblent désormais immuables, même si certaines dispositions vont à l’encontre des données scientifiques. Par exemple, la convention prévoit le même nombre d’élèves dans les classes de première et de sixième  année dans les milieux défavorisés. Or, les études ont démontré que c’est en première année que l’on doit investir le plus. Pourquoi ne pas augmenter le nombre d’élèves dans les classes de cinquième et sixième année et récupérer l’argent pour l’investir dans de plus petits groupes en première et deuxième année? Ce genre de proposition, basée sur la recherche, se heurte toujours à une fin de non-recevoir.»

Un système performant

Claude Daviau a terminé sa carrière à titre de directeur adjoint de la CSDM, de 2016 à 2018, chapeautant les services pédagogiques et l’organisation scolaire pour les 17 000 employés du réseau montréalais. À la retraite depuis janvier dernier, il compte publier des articles et ouvrages en lien avec le milieu scolaire et la pédagogie, seul ou en collaboration avec d’autres chercheurs.

L’ancien enseignant devenu gestionnaire persiste et signe: le système d’éducation québécois est l’un des plus performants au monde, dit-il. «On met souvent l’accent sur les aspects négatifs et, ce faisant, on occulte les belles réussites. On chiale à propos du manque d’argent? Il n’y a jamais eu autant d’argent investi en éducation. On dit que les élèves sont plus difficiles? Il y a toujours eu des élèves en difficulté. On dit qu’il y a beaucoup d’enseignants qui quittent la profession? C’est un phénomène qui a toujours existé. Si un enseignant quitte parce qu’il n’est pas à la bonne place, c’est une bonne nouvelle. C’est un métier de passion, il faut vouloir s’impliquer et ne pas compter ses heures.»

Soirée Trajectoires 2019

La soirée Trajectoires 2019 aura lieu le 6 juin au Centre de création des 7 Doigts de la main. En ce 50e anniversaire de l’UQAM, cette édition spéciale se tiendra sous la présidence d’honneur de Jacques Primeau (B.A. communication, 1984), producteur, agent d’artistes et président des Productions Jacques K. Primeau, lui-même lauréat d’un prix Reconnaissance en 2009. Les billets pour assister à cet événement de célébration et de réseautage sont en vente au coût de 195 $.