Voir plus
Voir moins

Découvrir l’UQAM, se découvrir

La professeure Joanne Burgess se souvient de sa première rentrée comme étudiante à l’UQAM.

Par Joanne Burgess

24 septembre 2019 à 12 h 09

Mis à jour le 26 septembre 2019 à 17 h 09

Série Histoires uqamiennes
Quelques instantanés du parcours uqamien se révèlent sous la plume de Joanne Burgess, présidente du Comité institutionnel du 50e anniversaire de l’UQAM. Premier texte de la série.

Professeure au Département d’histoire, Joanne Burgess (Ph.D. histoire, 1987) a connu sa première rentrée à l’UQAM en 1973, comme étudiante à la maîtrise.Photo: Nathalie St-Pierre

L’anniversaire d’une institution, et plus encore un 50e, est un moment de commémoration, un moment pour « se souvenir ensemble », selon la belle expression de la muséologue Annette Viel. Mais au-delà des événements officiels et des activités collectives, surgissent aussi des souvenirs plus personnels des relations tissées avec cette université depuis les 50 dernières années. 

Mais où est donc l’UQAM?

C’était l’été 1973 – en juillet, si ma mémoire est bonne. J’avais appris, quelques semaines plus tôt, que ma demande d’admission à la maîtrise en histoire à l’UQAM avait été acceptée. Une longue grève étudiante avait conduit à la prolongation de la session d’hiver et au report de la date de dépôt des demandes d’admission. J’avais donc pu décider, tardivement, de soumettre mon dossier, puis de quitter mon emploi à Ottawa pour partir à l’aventure dans la métropole. Je me retrouvais donc à Montréal, quelques semaines avant le début des cours, à la recherche d’un appartement et, par la même occasion, curieuse de visiter le campus de cette université que je ne connaissais pas.

Naïveté, optimisme, esprit d’aventure? J’avais choisi l’UQAM sans avoir la moindre idée de l’institution. Je partais donc à la découverte de son campus – une espèce de mission de reconnaissance – avant le grand jour du début des cours. Ma destination: le secteur De Bleury–René-Lévesque (Dorchester, à l’époque) –De La Gauchetière. Or, dans ce quadrilatère hébergeant l’église du Gesù et le collège Sainte-Marie, des immeubles à bureaux hétéroclites, des lofts industriels, des restaurants, des boutiques et quelques résidences, tristes reliques du 19e siècle, absolument rien ne ressemblait à un campus universitaire! C’était le premier indice que la vie à l’UQAM serait très différente de mon premier cycle à l’Université d’Ottawa.

Découvrir l’UQAM

Le Read building, dont l’entrée principale donnait rue De La Gauchetière, a été l’un des premiers pavillons de l’UQAM.Photo: Gilles St-Pierre/Service des archives

Au début des années 1970, pour tout étudiant ou étudiante en sciences humaines, l’UQAM, c’était d’abord le pavillon Read. Que dire du Read? C’était un des premiers gratte-ciel de Montréal, construit en 1912 et conçu pour accueillir des entreprises manufacturières. L’entrée principale donnait rue De La Gauchetière, à l’angle de Saint-Alexandre.  Un espace étroit, tout en longueur. À droite, un modeste restaurant, de type snack-bar. Et un peu plus loin, toujours à droite, un petit ascenseur grillagé, où jadis un opérateur veillait sur ses passagers et annonçait chaque étage. Y avait-il toujours un opérateur? Quoi qu’il en soit, le délai était toujours trop long.  Au fond du long couloir, l’espace s’élargissait et une série de monte-charges donnaient accès aux étages supérieurs. Mais pour s’y rendre, quelle épopée – car il fallait d’abord traverser l’entrée où des militants de toutes les associations et de tous les groupes de gauche distribuaient tracts, journaux et appels à l’action : boycott des raisins de Californie, soutien aux grévistes de la Shellcast de Montréal-Nord, soirées de solidarité Québec-Chili.

Une activité fébrile caractérisait le Read, depuis tôt le matin jusqu’à tard en soirée. Toutes les plages horaires étaient mobilisées pour tenter de pallier la pénurie de locaux. Un souvenir mémorable – les cours du soir qui débutaient à 20 h 00 pour se terminer à 23 h 00! Et que dire des salles de classe – ces vastes espaces industriels subdivisés par des cloisons et dont les colonnes en fonte rappelaient les fonctions d’origine.  

Se découvrir

Passionnée d’histoire: Joanne Burgess à Paris en 1976.

La découverte de l’UQAM, c’était surtout le contact avec une nouvelle discipline – l’histoire. Formée en sciences économiques et initiée aux perspectives historiques par quelques cours et séminaires de baccalauréat, j’apprenais qu’une maîtrise en histoire était vraiment autre chose. C’était d’abord une rencontre déstabilisante avec auteurs, approches et ouvrages « classiques » que tous semblaient déjà connaître. Mais c’était aussi, et surtout, l’immense privilège – la chance inouïe – d’atterrir dans un département à l’avant-garde de la recherche en histoire urbaine et des études sur Montréal. Au sein du Groupe de recherche sur la société montréalaise au 19e siècle, travaillant sous la direction de Paul-André Linteau et de Jean-Claude Robert, je découvrais le passé de la métropole et je prenais goût à l’archive. Je découvrais que la recherche historique me passionnait, que l’histoire de Montréal me fascinait. Le rêve de devenir historienne venait de poindre.